Dans une ville du Midi, une jeune femme devient la proie d’un élu sans scrupules… Par Charlène Favier (« Slalom »), un drame percutant sur l’emprise, adapté du roman éponyme de Tanguy Viel. Avec Alba Gaïa Bellugi (« Manon ») et Pascal Greggory.

« J’étais ‘la fille qu’on appelle’« , résume Laura Corre aux policiers que le hasard a désignés, ce matin-là, pour recueillir sa plainte contre Quentin Le Bars. Puis, comme ce duo conforme à la tradition (une méchante, un gentil) manifeste son incompréhension, elle ajoute : « C’est comme ça qu’on dit, non ? Une call-girl. » Ministre depuis peu, l’homme a longtemps été le maire de cette ville de la côte où Laura a grandi, et où elle est revenue vivre après quelques années de galère à Paris. Hébergée par son père, Max, chauffeur de l’édile et ancien boxeur, elle s’est apprêtée pour le rendez-vous que celui-ci lui avait arrangé avec son patron afin de l’aider à obtenir un logement. Le maire, qui a plus du double de son âge, a décelé d’emblée une proie dans la jeune femme gracile, à la fois affranchie et intimidée par son pouvoir, qui est entrée dans son bureau. Il a demandé à l’un de ses obligés, le gérant du casino local, d’octroyer à Laura l’un des studios sous les toits, et un travail derrière le bar : une prétendue faveur qu’elle paiera cher. C’est aussi au casino que Max, à ses risques et périls, est remonté sur le ring pour un combat amateur qu’il rêvait de remporter…

Mécanique 
Sous la forme d’un flash-back, de plus en plus éprouvant au fil de la déposition de Laura, Charlène Favier transpose de la Bretagne à la côte méditerranéenne baignée par la lumière aveuglante de l’été le roman éponyme de Tanguy Viel. La réalisatrice de Slalom, film largement autobiographique présenté en sélection officielle à Cannes en 2020, expose les mécanismes de la domination et de l’emprise, qui contraignent d’abord son héroïne à subir en silence. Face à Pascal Greggory, aussi convaincant que glaçant en abuseur sans scrupules, Alba Gaïa Bellugi, inoubliable Manon, insuffle à son personnage un étonnant mélange de détermination et de fragilité. Les liens silencieux qui l’unissent à son père (Jean-Pierre Martins, lui aussi excellent) offrent un contrepoint délicat à la violence feutrée de ce récit tendu.